12/10/2025 | Press release | Distributed by Public on 12/10/2025 07:26
Le journaliste du média privé Fil Infos et administrateur de la page Facebook de Radio Oméga, Moussa Sareba, a été enlevé le 10 août dans les locaux de son média à Ouagadougou. Quatre mois plus tard, ses proches et ses collègues restent sans nouvelle. Reporters sans frontières (RSF) dénonce une disparition forcée qui fait désormais partie d'un scénario trop bien connu dans le pays et demande aux autorités burkinabè de se prononcer sur le sort réservé au journaliste et de le libérer sans délai.
Cela fait quatre mois que Moussa Sareba a disparu. Dans la matinée du 10 août, le journaliste aurait reçu un appel téléphonique d'un individu non-identifié, lui demandant de se rendre dans les locaux de Fil Infos, près du Boulevard Thomas Sankara à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, selon les informations recueillies par RSF. Le journaliste s'y est rendu en mobylette. À son arrivée, plusieurs individus, se présentant comme des agents de la Direction générale de la police nationale (DGPN), lui auraient ordonné de les suivre.
Le cortège se rend ensuite à son domicile, situé dans le 11e arrondissement de Ouagadougou. Moussa Sareba serait alors entré chez lui, accompagné de deux individus habillés en civil, pour récupérer son téléphone et son ordinateur, selon les informations recueillies par RSF. Depuis, les proches et collègues du journaliste n'ont plus eu aucun contact avec lui et ignorent où il est détenu. RSF a sollicité des informations auprès du ministère de la Communication, mais n'a reçu à ce jour aucune réponse.
Si Moussa Sareba a été enlevé dans les locaux de Fil Infos, il est aussi administrateur de la page Facebook du média Radio Oméga. Dix jours avant de disparaître, le 30 juillet, il y avait publié un article - adapté d'une brève diffusée sur les ondes de la radio - sur le décès de l'influenceur burkinabè Alino Faso, comportant le terme "junte" pour désigner les autorités en place, arrivées au pouvoir par un coup d'Etat militaire en septembre 2022. Pour cette raison, dès le 1er août, cette publication a entraîné une suspensionde trois mois de Radio Oméga en raison de "propos malveillants et discourtois vis-à-vis des autorités burkinabè",selon le Conseil supérieur de la communication (CSC). Le journaliste auteur de la brève, Solomane Nikièma, a été interpellé le 9 août, puis libéré dès le lendemain soir.
"Alors que plusieurs journalistes réquisitionnés ou portés disparus ces derniers mois ont recouvré la liberté, la disparition de Moussa Sareba, qui dure depuis quatre mois, est inquiétante. Son arrestation dans les locaux de son média et le silence autour de l'affaire démontrent une nouvelle fois la volonté des autorités de faire taire toute voix indépendante. Ici, le journaliste n'a pas été enlevé pour une critique ou pour une enquête, mais simplement pour avoir employé le terme "junte", peu apprécié par le pouvoir burkinabè. RSF condamne cette disparition forcée et demande aux autorités de révéler où se trouve Moussa Sareba et de le libérer immédiatement.
Radio Oméga suspendue trois mois
Même si la suspension de Radio Omégaa pris fin au début du mois de novembre, le média n'a pas pu reprendre ses programmes, officiellement pour des raisons de réorganisation interne.
La situation des journalistes s'est gravement détériorée au Burkina Faso depuis l'arrivée au pouvoir d'Ibrahim Traoré en septembre 2022. Arrestations, réquisitions, suspensions, contrôle accru de l'information : l'arsenal répressif utilisé par les autorités est inégalé dans la région. Si sept journalistes ont été libérésdurant l'été, le directeur de publication du journal d'investigation L'Événement, Atiana Serge Oulon, reste vraisemblablement réquisitionnépar les autorités, et ce depuis juin 2024.