IMF - International Monetary Fund

04/15/2025 | Press release | Distributed by Public on 04/14/2025 22:36

Les services du FMI achèvent leur mission de Consultation au titre de l’Article IV 2025 au Burundi

Les services du FMI achèvent leur mission de Consultation au titre de l'Article IV 2025 au Burundi

le 15 avril 2025

Les communiqués de presse de fin de mission contiennent des déclarations des équipes des services du FMI qui rendent compte de leurs conclusions préliminaires après leur visite dans un pays. Les avis exprimés dans la présente déclaration sont ceux des services du FMI et ne correspondent pas nécessairement à ceux du conseil d'administration du FMI. À partir des conclusions préliminaires de cette mission, les services du FMI établiront un rapport qui, sous réserve de l'approbation de la direction, sera présenté au conseil d'administration pour examen et décision.

Washington, DC: Une équipe du Fonds monétaire international (FMI) dirigée par Alexandre Chailloux s'est rendue au Burundi du 17 au 28 mars pour tenir des réunions avec les autorités burundaises et d'autres homologues des secteurs public et privé à l'occasion des consultations annuelles de 2025 au titre de l'Article IV. Les entretiens ont porté principalement sur les mesures à prendre pour assurer la stabilité macroéconomique et sur le programme de réformes structurelles nécessaires pour soutenir durablement la croissance, asseoir la viabilité de la dette, renforcer la stabilité du secteur financier, réduire la pauvreté et renforcer la résilience aux risques climatiques.

Contexte, perspectives macroéconomiques et risques

  1. L'économie Burundais a connu une légère accélération de la croissance en 2024, mais continue de faire face à des défis. Le PIB a progressé de 3,5 % contre 3,3 % en 2023. Pour autant, le potentiel et les perspectives de croissance bien identifiés du Burundi pâtissent de l'instabilité macroéconomique et de faiblesses structurelles. La forte inflation, les pressions sur le taux de change parallèle, les réserves de change limitées et la pénurie prolongée du carburant continue de peser sur l'activité économique.
  2. L'inflation augmente depuis mi-2024. L'inflation, qui s'était repliée brièvement sous 15 % au premier semestre 2024 sous l'effet du resserrement de la politique monétaire et de la baisse des prix des denrées alimentaires, a ensuite rebondi et atteint 39 % en moyenne sur les deux premiers mois de 2025, en lien avec une croissance rapide de la masse monétaire. Les prévisions d'inflation demeurent préoccupantes, le recours continu au financement monétaire du déficit public pourrait en effet entretenir de fortes tensions inflationnistes jusqu'en 2027. La maîtrise de l'inflation doit être une priorité des autorités, compte tenu de son impact sur les plus pauvres et des distorsions économiques qu'elle engendre.
  3. La croissance devrait ralentir en 2025 et se redresser progressivement à moyen terme. Les faibles réserves de change donne lieu à de nouvelles restrictions sur le carburant et une réduction des importations, ce qui a ralenti l'activité début 2025. Les importations de biens de production sont plus faibles, ce qui pèse sur les activités secondaires et tertiaires.
  4. Le déficit courant devrait se réduire à court terme étant donné la poursuite de la compression des importations. Le déficit courant du Burundi s'est amélioré en 2024 et devrait continuer de baisser en 2025. La réduction du déficit des transactions courantes est principalement due à la baisse des importations. Les principales exportations ont diminué notamment en raison de la sous-facturation croissante des exportations agricoles. À moyen terme, la hausse des prix mondiaux du café et de l'or devrait stimuler les recettes d'exportation. En outre, la reprise de l'extraction minière et la signature de nouveaux contrats pourraient accroître les recettes d'exportation d'or et les réserves de change, et ainsi assouplir les restrictions aux importations à l'avenir. La prime de change a plus que doublé en 2024, mais s'est stabilisée en 2025.
  5. La dette publique est jugée viable mais avec un risque de surendettement élevé. Cette évaluation repose sur la poursuite par les autorités d'une réforme de la politique de change et d'autres réformes. L'encours de la dette publique totale s'élevait à environ 52 % du PIB fin 2024. La dette intérieure, qui en représente environ les deux tiers, est en grande partie détenue par la banque centrale (BRB). D'ici à 2030, le ratio de la dette publique totale devrait baisser continument, principalement en raison de taux d'intérêt réels négatifs appliqués à la dette intérieure.
  6. Le système financier est resté résilient face à de multiples chocs. Le ratio des fonds propres de base s'élevait à 17,1 % en décembre 2024, les actifs liquides représentaient 19 % des prêts et les actifs liquides rapportés au total des actifs pondérés des risques s'établissaient à 15,4 %. Cependant, ces indicateurs masquent des risques croissants. La croissance du crédit est restée élevée, à 27,2 %, tandis que les créances non performantes sont passées de 2,7 % en 2023 à 3,8 % en 2024.
  7. L'essoufflement de la dynamique de réformes depuis 2024, conjugué à une conjoncture extérieure plus difficile, crée de nouveaux risques pour l'économie. Le ralentissement attendu de la croissance mondiale, la réduction des flux d'aide publique au développement et la réémergence des barrières au commerce mondial pourraient détériorer les perspectives. Il est essentiel de relancer la dynamique des réformes initiée en 2022-23, avec notamment des politiques budgétaires et monétaires bien coordonnées et des réformes structurelles visant à soutenir la croissance du secteur privé et à stimuler les secteurs d'exportation et l'investissement étranger.

Politique budgétaire

  1. La baisse des recettes fiscales en termes réels pour l'exercice 2024/2025 souligne la nécessité d'assainir rapidement les finances publiques. En l'absence d'appuis budgétaires des partenaires, la poursuite de la monétisation des déficits budgétaires risque de placer l'inflation sur une trajectoire difficile à contrôler. Même si les surprises d'inflation peuvent à court terme contribuer à limiter les déficits (par une indexation plus rapide des recettes en valeur nominale), la diminution des dépenses en termes réels affecterait de manière disproportionnée les plus vulnérables, dont le pouvoir d'achat est déjà fragilisé.
  2. Il est essentiel d'accroître l'efficacité de la collecte des recettes fiscales. Les services du FMI félicitent les autorités d'avoir entrepris la numérisation des déclarations et des paiements des impôts et d'avoir déployé des machines de facturation électronique pour la fiscalité indirecte. D'autres réformes sont nécessaires, notamment la préparation d'un registre des contribuables et un examen annuel des exonérations fiscales pour limiter les abus et garantir qu'elles élargissent l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Une plus grande transparence dans le recouvrement des recettes non fiscales - par des ministères et organismes dépensiers autres que l'administration fiscale - renforcerait la responsabilité.
  3. Une révision de la politique fiscale est une priorité. Les mesures actuelles ont un impact disproportionné sur les personnes les plus vulnérables : la TVA et les droits d'accise représentent plus de la moitié des recettes fiscales, tandis qu'un secteur formel étroit supporte la charge de l'impôt sur les sociétés et sur le revenu des personnes physiques. De généreuses exonérations érodent encore davantage les recettes. La transition vers un cadre fiscal plus optimal, plus redistributif et favorable à la croissance, appuyée par l'assistance technique du FMI, soutiendra l'économie et renforcera la mobilisation des recettes intérieures.
  4. Les services du FMI accueillent favorablement les réformes en cours de la gestion des finances publiques qui visent à améliorer l'efficience des dépenses. La décentralisation des paiements et l'adoption d'un budget-programme pluriannuel sont en cours. Parmi les autres priorités de réforme de la gestion des finances publiques figurent le renforcement des audits internes et externes et l'amélioration de la gestion des investissements publics.
  5. Pour assurer la viabilité de la dette publique, les pouvoirs publics devront prendre des mesures énergiques. Il s'agit notamment de la libéralisation du marché des changes, du rééquilibrage budgétaire et du resserrement monétaire. Ces réformes stimuleront la croissance économique, les recettes d'exportation et les recettes fiscales, tout en favorisant l'augmentation des financements des partenaires. Les autorités sont invitées à faire preuve de prudence dans la gestion de la dette, en privilégiant les financements sous forme de dons.

Politique de change et politique monétaire

  1. Le cadre de politique monétaire doit être modernisé. Les services du FMI et les autorités conviennent que la BRB devrait renforcer son cadre transitionnel de ciblage monétaire flexible tout en travaillant à la mise en place à terme d'un régime de ciblage de l'inflation. Le sous-développement des marchés financiers et l'accès restreint au crédit entravent la transmission d'une politique monétaire fondée sur les taux d'intérêt. L'introduction prochaine d'une nouvelle plateforme de négociation interbancaire devrait améliorer l'efficacité opérationnelle du taux directeur. Dans le même temps, la BRB devrait continuer de donner la priorité à la masse monétaire M2 comme objectif intermédiaire et assurer une communication plus claire de son objectif d'inflation de 8 % aux acteurs financiers et au public.
  2. Les services du FMI soulignent qu'il est urgent de procéder à un resserrement quantitatif et de préserver l'indépendance de la BRB afin de limiter les risques de monétisation du déficit budgétaire. L'épisode actuel de financement monétaire illustre les risques que fait peser la dominance fiscale sur d'inflation et la dépréciation du taux de change parallèle. Pour contrôler l'inflation, il est essentiel de ramener le taux de croissance de la base monétaire en dessous de 20 % et de faire respecter le plafond des avances de l'État. Les services du FMI recommandent à la BRB de relever son taux directeur, actuellement fixé à 12 %, afin de maintenir la crédibilité de son engagement à adopter une politique monétaire restrictive.
  3. Les services du FMI ont réaffirmé qu'un taux de change unifié et proche de son niveau d'équilibre demeure essentiel pour stabiliser l'économie et sortir du piège actuel de croissance faible et d'inflation élevée. Le régime actuel de taux de change dual et la prime de change élevée crée des distorsions généralisées dans l'économie. La faiblesse des réserves de change entretient les pénuries de carburant, les perturbations des chaînes d'approvisionnement, entrave les exportations agricoles, encourage les exportations illégales, le secteur informel et l'évasion fiscale, ce qui nuit à l'investissement direct étranger et aux flux d'aide publique. Pour réduire ces déséquilibres il est nécessaire d'unifier les taux de change officiel et parallèle, de libéraliser le marché des changes et de passer progressivement à un système de change flottant. Avec les politiques budgétaire et monétaire de soutien et les réformes structurelles, les réformes de change sont une condition préalable importante pour que le Burundi réalise son potentiel économique.

Politiques du secteur financier

  1. Les services du FMI encouragent la BRB à procéder à une revue de la qualité des actifs (EQA) afin d'évaluer les portefeuilles de prêts des banques. À la suite de l'EQA, une évaluation des ratios d'adéquation des fonds propres serait justifiée, tout en enjoignant aux banques d'investir dans le renforcement des capacités du personnel en vue d'une meilleure évaluation du risque de crédit. Enfin, la BRB devrait mettre en œuvre un dispositif solide pour surveiller l'exposition des banques à la dette souveraine, en intégrant des tests de résistance au risque souverain et en favorisant la diversification des actifs, tout en envisageant des exigences de fonds propres spécifiques aux en cas d'exposition élevée au risque souverain.
  2. Les services du FMI saluent l'accent mis par les autorités sur la modernisation des systèmes de paiement et la numérisation des paiements. Des instruments de paiement plus efficaces, tels que les paiements mobiles, les QR codes et des plateformes de paiement mieux intégrées et interopérables, contribueront à réduire l'utilisation dominante des espèces dans l'économie, ce qui facilitera l'approfondissement du système financier et renforcera la transmission de la politique monétaire. Le fait d'accroître l'utilisation des paiements effectués à destination et en provenance de l'État peut également contribuer à réduire l'informalité, à renforcer la mobilisation des recettes intérieures grâce à une meilleure élargissement de l'assiette fiscale et à accélérer le décaissement et le ciblage des transferts sociaux.

Politiques structurelles

  1. Les autorités sont encouragées à accélérer la mise en œuvre de leur programme de réformes ambitieux, en privilégiant des réformes structurelles qui comblent les lacunes en matière de gouvernance, renforcent l'état de droit et éliminent les goulets d'étranglement qui freinent depuis longtemps la productivité. Il sera essentiel d'améliorer les performances des entreprises publiques, de moderniser le secteur du café et d'améliorer les infrastructures liées au commerce pour libérer le potentiel de croissance du Burundi. Des avancées dans ces domaines favoriseraient une économie plus ouverte et compétitive, tout en améliorant la qualité des institutions et en réduisant l'écart avec les pays comparables de la région sur des indicateurs clés tels que l'ouverture commerciale, le climat d'investissement et l'efficacité des pouvoirs publics. Les autorités souhaitent centrer leur action sur les programmes qui permettront à la production locale de se substituer aux importations notamment alimentaires et d'augmenter les exportations notamment le café, le thé, l'avocat, les minerais et d'autres produits locaux bénéficiant du climat favorable.
  2. Le secteur du café est vital pour l'économie burundaise, mais il est confronté à des contraintes structurelles qui limitent son potentiel. Les services du FMI saluent les efforts déployés par les autorités pour vendre le café burundais à des prix plus élevés et pour combler l'écart entre les prix à l'exportation et les prix mondiaux du café. Toutefois, des pratiques agricoles dépassées, un accès limité au financement et aux intrants et un sous-investissement dans la transformation continuent de peser sur la productivité. En outre, la prime de change représente un défi majeur pour le secteur, car la conversion des recettes d'exportation au taux officiel décourage les agriculteurs et encourage la contrebande et les prix de transfert. Il sera essentiel de renforcer les coopératives, d'améliorer les infrastructures, de promouvoir la valeur ajoutée et de garantir un environnement réglementaire stable et une répercussion plus large des prix internationaux vers les petits producteurs de café afin de stimuler la compétitivité des exportations et d'attirer les investissements.
  3. Malgré son potentiel et des signes encourageants le pays fait face à des difficultés dans le secteur minier. Les contrats signés les années précédentes n'ont pas généré de recettes d'exportation Conscientes des difficultés rencontrées par le secteur minier, les autorités ont engagé des politiques résolues pour restructurer ce secteur et accroître ses recettes d'exportation. Elles ont rompu des contrats improductifs et s'efforcent de faire en sorte que le pays reçoive les paiements miniers en amont des projets, au lieu d'attendre la fin du cycle d'extraction et du traitement, comme cela a été le cas dans le passé. L'amélioration du cadre de gouvernance et de la transparence du secteur, notamment en adhérant à l'ITIE, serait essentielle pour exploiter le potentiel du secteur.

L'équipe de la mission du FMI remercie les autorités burundaises et tous ses autres interlocuteurs de leurs entretiens francs et de leur hospitalité.

Département de la communication du FMI

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ATTACHÉ DE PRESSE: Tatiana Mossot

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