12/03/2025 | News release | Distributed by Public on 12/03/2025 14:48
Le 5e Forum du Cercle des leaders a réuni la vice-rectrice aux études et aux affaires étudiantes, responsable de la santé Cathia Bergeron, l'entrepreneur social Fabrice Vil, la pédiatre Joanne Liu et le grand explorateur Bernard Voyer.
- Université Laval - Yan Doublet
Le mardi 2 décembre, l'auditorium Jean-Paul-Tardif du pavillon La Laurentienne a accueilli le 5e Forum du Cercle des leaders de l'Université Laval. Plusieurs dizaines de personnes en présence ou en ligne ont assisté aux échanges entre la vice-rectrice aux études et aux affaires étudiantes, responsable de la santé, Cathia Bergeron, qui agissait comme animatrice, et trois des six membres du Cercle des leaders, la pédiatre Joanne Liu, l'entrepreneur social Fabrice Vil et le grand explorateur Bernard Voyer.
Pour rappel, ce Forum est devenu un rendez-vous incontournable pour les personnes qui veulent mieux comprendre comment le leadership peut s'exercer dans des environnements complexes et collaboratifs.
Cette année, le thème du Forum était «Le leadership en contexte interdisciplinaire et intersectoriel». Les questions suivantes ont nourri la réflexion tout au long du Forum. Comment sortir de sa zone de confort pour aller à la rencontre de l'autre? Comment arriver à se comprendre, malgré des cadres théoriques et des méthodologies différentes? Comment favoriser la collaboration entre des personnes qui ont des parcours très différents? Comment mieux intégrer nos savoirs, nos idées et nos expériences pour construire des solutions ensemble?
En introduction, Cathia Bergeron a expliqué qu'à l'Université Laval, «nous croyons que l'intégration des savoirs issus de différentes disciplines et expertises permet d'avoir un impact plus grand sur la société». Selon elle, l'interdisciplinarité fait référence à l'intégration de perspectives, de méthodes ou de connaissances provenant d'au moins deux disciplines, tandis que l'intersectorialité réfère à la collaboration entre différents secteurs d'activité, notamment le public, le privé, le communautaire, le culturel et l'universitaire. «À l'Université, a-t-elle poursuivi, nous souhaitons développer encore plus de programmes qui intègrent plusieurs disciplines, créer de nouvelles chaires de recherche interdisciplinaires et valoriser les parcours atypiques et les projets transversaux.»
D'entrée de jeu, Bernard Voyer et Joanne Liu ont donné des exemples de contextes où le fait de collaborer avec des gens provenant d'autres secteurs ou d'autres disciplines leur a permis de faire les choses autrement.
L'explorateur a effectué la première expédition canadienne à ski jusqu'au pôle Nord magnétique. Il a raconté une anecdote remontant à la préparation d'une autre expédition dans l'Antarctique. «J'étais très critique sur le matériel, a-t-il dit. J'ai voulu mettre des ingénieurs de Polytechnique Montréal à contribution pour la construction des traîneaux en kevlar et carbone. Un artisan de Lévis a aussi contribué au projet. Cela a donné un succès fantastique. Aux ingénieurs qui demandaient pourquoi modifier l'avant comme l'arrière, je répondais: pour ne pas que les traîneaux nous laissent au milieu de l'Antarctique. J'avais un savoir expérientiel.»
Joanne Liu a été présidente internationale de Médecins sans frontières (MSF) de 2013 à 2019. Elle a joué un rôle clé dans la réponse mondiale à des crises comme l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest. «En Guinée, a-t-elle expliqué, nous voulions installer un centre de soins au bout d'un village. Nos collaborateurs nous ont convaincus de l'installer au milieu du village. Quand les passants voyaient une personne infectée, ils lui disaient: "Ça va?". Cette installation a enregistré la plus faible mortalité parmi nos patients. C'était extraordinaire. Nous n'avions jamais fait ça avant. Pour cela, il faut avoir une ouverture d'esprit. Pas juste technique mais humaine. Ça prend aussi de l'humilité pour accueillir ça.»
Dans de tels contextes interdisciplinaires, comment exerce-t-on son leadership? «Médecins sans frontières compte près de 70 000 employés, dont une minorité sont des médecins, a souligné la Dre Liu. Les gens embarquent quand tu es capable d'articuler un projet qui apporte du sens et qui a un impact. L'idée est d'avoir des livrables à court terme pour nourrir la drive des gens. La rétro-information est importante, pas seulement aux grands donateurs, mais aussi aux artisans qui sont sur le terrain.» Bernard Voyer abonde dans le même sens. «On exerce son leadership quand l'objectif est clair, a-t-il soutenu. Une fois qu'on a déterminé l'objectif, que l'ascension est en cours, on ne change pas de sommet quand se lève une tempête de neige. Le leader est celui qui installe métaphoriquement la barre horizontale sur le T du silo des compétences.»
Dans une de ses réponses, Joanne Liu a insisté sur l'importance pour le leader d'avoir une vision commune, réciproque, empathique avec son équipe «sinon, il devient difficile de progresser, de s'investir à 100%». Selon elle, un leader doit connaître ses limites. «À ma première année comme présidente de MSF, a-t-elle indiqué, je me suis assurée d'avoir un cercle rapproché de gens qui pouvaient être en désaccord avec moi. C'est ça une équipe, connaître les forces et les faiblesses de chacun.»
Dans ses interventions, Fabrice Vil a souligné les avantages d'une formation généraliste pour un leader. «L'idée, a-t-il dit, est de s'intéresser à tout.» Selon lui, «il y a plus de richesse à naviguer entre les disciplines. Mais un vertige vient avec ça». L'entrepreneur social a insisté sur la question du respect, celle de la vision et celle de l'écoute chez un leader. «Ma croyance, a-t-il poursuivi, est que personne n'est propriétaire d'une vision. Parfois, la vision est trouble. Et avoir de l'écoute ne veut pas dire qu'il faut tout accepter.»
À la question de savoir s'il existe un concept universel du leadership, Bernard Voyer a répondu: «Si on me demande demain d'être leader dans la construction du tramway à Québec, j'ai zéro contenu. On n'est pas leader tout le temps. Ça prend des idées, de l'expérience.»
En guise de conclusion, Joanne Liu a prôné l'ouverture à l'autre. «Aujourd'hui, a-t-elle soutenu, on vit chacun dans sa chambre de résonance et on se trouve bien bon. Je suis habitée par les enjeux internationaux. Il est important d'arrêter de parler à ceux qui pensent comme nous. Oui, la Scandinavie, mais aussi parler à la Chine, au Congo. Il faut avoir une affection pour qui ne pense pas comme nous, c'est important, ça va briser les cloisons. Je suis très inquiète de ce qui se passe, par ceux qui sont convaincus que leur façon de faire est la seule. Si on continue, on fonce dans le mur.»