Ministry of Europe and Foreign Affairs of the French Republic

12/08/2025 | Press release | Archived content

Entretien de M. Pascal Confavreux, porte-parole du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, avec « France Info »(Paris, le 8 décembre 2025)

Q - Pascal Confavreux est porte-parole du ministère français des affaires étrangères, il souligne que cette rencontre de Londres avait plusieurs objectifs.

R - Le premier, c'était effectivement de dire que nous soutenons tous l'Ukraine, la paix et les négociations de paix pour l'Ukraine. Le deuxième, c'était aussi de dire que nous avons aussi beaucoup de cartes en main. On a un peu tendance à l'oublier, on pourra y revenir. Et puis le troisième, c'est de travailler sur la convergence de nos positions, c'est-à-dire de poursuivre le travail commun sur le plan américain, pour le compléter avec les contributions européennes et en lien avec les Ukrainiens. Il y a eu un travail après, cet après-midi, de finalisation par ce qu'on appelle les NSA, les National Security Advisors - dans notre système, c'est le conseiller diplomatique du président de la République - et en vue ensuite d'échanges entre Européens, Américains et Ukrainiens dans les prochains jours. Donc le travail, c'était celui de convergence des positions européennes avec l'Ukraine aujourd'hui.

Q - Est-ce qu'il faut, coûte que coûte, garder ce lien avec les Américains ? On sent bien que du côté des États-Unis, ce lien, pardonnez-moi l'expression, mais on n'en a pas grand-chose à faire finalement.

R - Il faut le faire, il faut le faire. Nous soutenons les efforts de médiation des Américains qui vont dans le sens de la paix, vous savez aussi, comme moi, que les Américains continuent leurs efforts en faveur de l'Ukraine. Il y a les sanctions qu'ils ont imposées il y a encore une dizaine de jours sur Rosneft et Lukoil et qui sont très majeures puisque c'est à peu près trois millions de barils qui sont touchés par ces sanctions.

Q - Mais on sent bien, et Donald Trump n'a pas eu des propos très tendres à l'égard de l'Europe, des mots assez durs d'ailleurs sur l'avenir du continent européen, en parlant de sa civilisation, et puis aussi des mots très durs à l'égard de Volodymyr Zelensky, on sent bien qu'il met une pression très forte. Comment tenir le cap dans ces conditions ?

R - En étant soudés. Et je crois que c'était aussi le message qu'il y a eu cet après-midi. On est soudés entre Européens. Combien aurait cru il y a trois ans qu'il y aurait une formidable unité de l'Union européenne là-dessus ? Je vous rappelle que nous sommes à 19 paquets de sanctions. Les paquets de sanctions, il faut l'unanimité de l'Union européenne à chaque fois pour y parvenir. On travaille d'ailleurs pour un 20e paquet de sanctions. Ces sanctions, elles ont aussi un impact, non seulement parce que l'économie russe, elle souffre, les revenus pétroliers sont en diminution constante depuis cet été. On calcule, je crois, que les revenus d'exportation pétrolier en septembre 2025, c'est 50% des revenus de septembre 2022. C'est dû à différents facteurs, notamment les sanctions. Vous avez une économie russe, vous avez 40% de l'effort budgétaire russe qui est sur le sujet militaire, donc vous avez une atrophie aussi de l'industrie civile russe. Par ailleurs, cela, c'est la partie pression sur l'économie russe, vous avez ensuite un soutien formidable et collectif à l'Ukraine. Il y aura un Conseil européen le 18 décembre prochain qui aura pour but de justement mettre à plat la capacité de soutenir et de donner de la visibilité à l'Ukraine dans le soutien économique dans les deux et trois prochaines années.

Q - Comment faire, quelles sont, puisque vous évoquiez tout à l'heure les cartes que les Européens ont en main, quelles sont ces cartes, comment les Européens peuvent essayer de garder un pied dans la porte pour essayer de s'imposer dans ces négociations, je dis bien s'imposer, parce que pour l'instant, personne ne veut des Européens, ni Vladimir Poutine, ni Donald Trump. Ils sont à chaque fois, finalement, absents des discussions. C'est soit d'un côté avec Donald Trump, mais jamais, évidemment, avec la Russie. Et finalement, ils sont toujours mis de côté.

R - Non, non, non. Il y a des discussions constamment que nous avons avec la partie américaine. Ces cartes, elles sont simples. Vous avez les garanties de sécurité pour l'Ukraine. Qui est-ce qui les donnera ? C'est nous. C'est le travail initié par les Anglais et les Français dans ce qu'on appelle la Coalition des volontaires. Vous avez la capacité de financement en l'asseyant sur les avoirs gelés notamment. Il y a une proposition de la Commission en ce moment qui viendrait en fait dire que via les revenus de trésorerie liés aux avoirs russes gelés, nous pourrions financer environ 140 milliards sur les trois années qui viennent.

Q - Ça, les Européens seront d'accord ? Parce que l'on sait qu'il y a des réticences.

R - Nous, nous travaillons sur cette option-là. Il y a un travail qui est très intense en ce moment entre Européens et résultat le 18 décembre prochain.

Q - « L'Europe prend certaines mauvaises directions. » C'est Donald Trump qui le dit. C'est l'illustration, Pascal Confavreux, tout de même, de cette difficulté que j'évoquais tout à l'heure des Européens à se faire entendre. Vous qui êtes porte-parole du Quai d'Orsay, c'est quand même des manières particulières de négocier. Quand vous voyez qu'à Moscou, pour discuter avec Vladimir Poutine, ce ne sont pas des diplomates, il n'y a ni secrétaire d'État, ni président des États-Unis, mais bon, voilà, le gendre de Donald Trump et un envoyé spécial, Steve Witkoff, comment faire dans ces conditions ?

R - C'est une question que j'ai fréquemment, mais ce n'est pas nous qui choisissons les émissaires ou les personnes que les États ont envie de mettre pour ces négociations.

Q - C'est certain, mais ce n'est pas banal quand même.

R - On connaît quand même bien la position du président Trump et de l'administration américaine. Il l'exprime depuis plusieurs mois, il l'exprime depuis plusieurs années. Je crois que cela renforce l'intuition que nous avons ici, depuis le discours de la Sorbonne du président Macron, qui est bien sûr toujours continuer avec le partenaire américain, mais aussi de compter sur nos propres forces, d'avoir cette souveraineté européenne. L'agression russe de l'Ukraine depuis février 2022 nous fait aussi franchir des pas de géants en la matière. Qui aurait cru qu'il y avait de l'argent européen pour acheter des armes ? Le sujet de la défense de l'Union européenne, ce n'était pas vraiment son cœur d'action par le passé. Des armes pour aller soutenir l'Ukraine. Qui aurait cru que nous serions capables d'avoir une forme d'endettement commun ? C'est ce que l'on appelle le projet SAFE de 150 milliards [d'euros] pour aller s'équiper militairement et entre États européens de manière commune. Qui aurait cru aussi que nous serions là en train de discuter sur ce projet de plan de réparation d'environ 140 milliards pour l'Ukraine assis sur des avoirs gelés ? Ce sont des efforts qui sont très importants. On voit que l'Union européenne, malgré aussi un petit peu parfois les narratifs de ceux qui ne lui veulent pas forcément du bien, elle tient et elle avance constamment. Je pense que le Conseil européen sera intéressant le 18 décembre prochain.

Q - Pour être très concret, est-ce que les Européens préparent peut-être l'après-soutien américain ? Est-ce qu'ils ont aussi… Question évidemment qui va avec la première, est-ce qu'ils ont les moyens de soutenir l'Ukraine, de continuer à soutenir Kyiv si les États-Unis s'en vont ?

R - On continue de la soutenir de manière, je crois, qu'il ne peut pas y avoir d'hésitation là-dessus. Je voudrais vous dire, déjà depuis février, en réalité, le financement de l'équipement militaire américain, il est européen, il n'est plus américain.

Q - Mais il y a encore les renseignements, il y a encore des sanctions aussi…

R - Bien sûr. Et donc, nous, nous continuons effectivement à avancer là-dessus parce qu'en fait, ce qui se joue derrière ce qu'il se passe en Ukraine, c'est notre sécurité. Et je crois que d'ailleurs, à en voir le soutien que nous avons encore dans les populations européennes, nous voyons que nous sommes tous convaincus de cela.

Q - Les 27 ?

R - Encore une fois, après il peut y avoir des hésitations, mais de manière très unie, oui."

Ministry of Europe and Foreign Affairs of the French Republic published this content on December 08, 2025, and is solely responsible for the information contained herein. Distributed via Public Technologies (PUBT), unedited and unaltered, on December 10, 2025 at 07:49 UTC. If you believe the information included in the content is inaccurate or outdated and requires editing or removal, please contact us at [email protected]