RSF - Reporters sans frontières

12/17/2025 | Press release | Distributed by Public on 12/17/2025 15:12

Exclusif : RSF met au jour un nouveau logiciel espion utilisé par le KGB biélorusse

Le Digital Security Lab (DSL) de Reporters sans frontières (RSF), en collaboration avec l'organisation d'Europe de l'Est RESIDENT.NGO, a mis au jour un outil de surveillance jusqu'alors inconnu, utilisé par le Comité pour la sécurité de l'État (KGB) du Bélarus contre des professionnels des médias, entre autres. RSF estime que cette révélation constitue un revers majeur pour les opérations du KGB, d'autant plus que ce logiciel semble avoir été utilisé pendant plusieurs années.

Ce logiciel espion, initialement identifié sous le nom de "ResidentBat", cible les smartphones Android et permet l'accès à des données extrêmement sensibles. Contrairement à des logiciels espions bien connus utilisés contre des journalistes, tels que Pegasus, ResidentBat n'exploite pas de vulnérabilités numériques. Il est installé après que les forces de sécurité ont obtenu un accès physique à l'appareil. Une fois installé, ResidentBat permet l'accès aux journaux d'appels, aux enregistrements du microphone, aux captures d'écran, aux SMS, aux messages provenant d'applications de messagerie chiffrées, ainsi qu'aux fichiers stockés localement.

"En déployant des technologies de surveillance comme ResidentBat, l'État biélorusse poursuit une stratégie délibérée de répression contre le journalisme indépendant. Ces outils n'ont rien à voir avec la sécurité nationale invoquée par le prédateur de la liberté de la presse Alexandre Loukachenko ; ils relèvent au contraire de l'intimidation et de la volonté de faire taire des journalistes. L'intrusion systématique dans leurs vies privée et professionnelle constitue une atteinte directe et illégale à la liberté de la presse et aux droits fondamentaux. Une interdiction internationale de ces technologies invasives et perverses est attendue depuis trop longtemps, tout comme des poursuites effectives pour ces crimes commis contre les journalistes.

Antoine Bernard
Directeur du plaidoyer et de l'Assistance de RSF

Un logiciel espion masqué en application ordinaire

ResidentBat a été détecté sur le smartphone d'un journaliste qui avait été interrogé par le KGB. RSF a vérifié l'identité de cette personne mais ne la rend pas publique pour des raisons de sécurité.

Avant l'interrogatoire dans les locaux du KGB, le journaliste a été invité à déposer son téléphone portable dans un casier. Au cours de l'interrogatoire, il a dû montrer le contenu de l'appareil et a déverrouillé le téléphone en présence d'un agent. Par la suite, l'appareil a de nouveau été placé dans le casier. Le journaliste et RSF estiment que les forces de sécurité ont observé la saisie du code PIN, récupéré le téléphone pendant l'interrogatoire et installé le logiciel espion.

Quelques jours plus tard, un logiciel antivirus a signalé la présence de composants suspects sur l'appareil. Le journaliste a alors contacté RESIDENT.NGO, qui a mené une investigation numérique en collaboration avec le Digital Security Lab de RSF.

Utilisé depuis plusieurs années

En comparant des échantillons sur une plateforme antivirus, RSF a identifié d'autres variantes de ResidentBat, probablement utilisées par le même acteur. L'une des versions analysées remonte à 2021. RSF estime donc que le KGB utilise ce logiciel espion depuis au moins quatre ans. RSF a partagé les résultats de ses recherches avec Google. Afin de mieux protéger les personnes ciblées, le géant de la tech enverra une notification de "cyberattaque soutenue par un gouvernement" à tous les utilisateurs de Google que l'entreprise a identifiés comme cibles de cette campagne de logiciels espions.

L'identité du développeur de ResidentBat n'est pas encore établie. Certaines parties du code contiennent des chaînes de caractères en anglais, ce qui suggère qu'il pourrait s'agir d'un produit non exclusivement conçu pour le Bélarus ou développé par un tiers.

Liberté de la presse au Bélarus

Le journalisme indépendant est lourdement réprimé au Bélarus. Les journalistes y sont confrontés à la censure, à l'intimidation, aux violences et aux détentions arbitraires. À ce jour, 32 journalistes sont emprisonnés, et les signalements de torture se multiplient. Beaucoup ont fui le pays depuis 2020 et travaillent depuis l'exil. Ceux qui continuent à informer depuis l'intérieur du Bélarus le font souvent de manière anonyme et au péril de leur sécurité. L'usage de logiciels espions s'inscrit pleinement dans cette répression systématique. Le Bélarus occupe actuellement la 166e place sur 180 pays et territoires dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2025de RSF.

Pour en savoir plus

Le rapport technique complet (en anglais) est disponible ici.

Les journalistes susceptibles d'avoir été victimes d'une surveillance similaire peuvent contacter le Digital Security Labde RSF. Le rapport sur ResidentBat est également consultable sur le sitede Resident.ngo.

Publié le17.12.2025
RSF - Reporters sans frontières published this content on December 17, 2025, and is solely responsible for the information contained herein. Distributed via Public Technologies (PUBT), unedited and unaltered, on December 17, 2025 at 21:12 UTC. If you believe the information included in the content is inaccurate or outdated and requires editing or removal, please contact us at [email protected]