10/31/2025 | Press release | Distributed by Public on 10/31/2025 11:45
Le 21 octobre 2025
Ottawa (Ontario)
Allocution principale prononcée par Philippe Dufresne
Commissaire à la protection de la vie privée du Canada
(La version prononcée fait foi)
Bonjour, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui. Il s'agit d'une période importante pour la protection de la vie privée, et je suis très heureux d'être parmi vous pour faire le point sur la situation actuelle.
L'ordre du jour de cette conférence indique que bon nombre des questions qui préoccupent les professionnels du secteur des communications sont précisément celles sur lesquelles le Commissariat se concentre. Pour n'en nommer que quelques-unes : le contrôle de l'âge, la cybersécurité, l'intelligence artificielle (IA), l'informatique quantique et la protection des données des consommateurs dans un monde numérique en constante évolution.
Les données sont l'une des ressources les plus précieuses du 21e siècle. Elles peuvent favoriser et stimuler l'innovation, et la façon dont elles sont protégées détermine notre capacité à prospérer et à jouer un rôle de premier plan dans l'économie numérique.
Dès le moment où nous commençons notre journée et consultons nos téléphones, jusqu'au moment où nous nous détendons en écoutant de la musique ou en regardant notre série préférée, nos données personnelles sont sollicitées. Peu de gens le savent mieux que vous.
Les nouvelles technologies offrent de nouvelles possibilités pour se réunir, créer et innover. Mais elles présentent aussi des risques pour notre vie privée.
Au fur et à mesure que la nouvelle économie numérique se développe, il est important d'être conscient de la nécessité absolue de protéger les données personnelles et d'intégrer cette protection dès le tout début d'un projet et d'une initiative.
La confiance qu'ils accordent à la façon dont leurs données sont traitées est en train de devenir un facteur décisif dans la manière dont les gens interagissent avec le gouvernement, les entreprises, et la technologie.
Selon la récente recherche sur l'opinion publique du Commissariat, 9 personnes sur 10 au Canada se préoccupent de ce qui arrive à leurs renseignements personnels et moins de la moitié (40 %) font confiance aux entreprises pour protéger leur vie privée.
Pendant ce temps, les Canadiennes et les Canadiens prennent de plus en plus les choses en main en refusant de fournir leurs données personnelles, en modifiant leurs paramètres de confidentialité, en supprimant leurs comptes et en cessant de faire affaire avec les entreprises qui ont subi une atteinte.
Alors que les consommateurs accordent de plus en plus d'importance aux questions de vie privée, les organisations qui priorisent la protection de la vie privée constateront qu'elles bénéficieront d'un avantage concurrentiel.
Tout comme les données servent à stimuler l'innovation - en vue d'améliorer et de personnaliser les services, de générer des gains d'efficacité et d'évaluer les résultats -, l'innovation doit aussi servir à protéger les données.
Lorsque les gens ont la certitude que leurs droits seront protégés, ils se sentent en confiance pour participer librement à l'économie numérique. C'est avantageux à la fois pour la population canadienne, pour les affaires et pour l'innovation.
Lors d'une récente conférence consacrée à l'intelligence artificielle, le ministre de l'Intelligence artificielle, Evan Solomon, a déclaré que la devise de son ministère était [traduction] « l'adoption progresse à la vitesse de la confiance ».
Je suis d'accord et je dirais que des lois rigoureuses en matière de protection des renseignements personnels contribueraient aussi grandement à instaurer cette confiance.
Le Canada a besoin de balises claires pour assurer une gestion responsable des données, qui favorisera les progrès dans des domaines essentiels.
C'est pourquoi j'ai également accueilli favorablement les récentes déclarations du ministre Solomon concernant les plans du gouvernement, qui visent à moderniser les lois sur la protection des renseignements personnels dans les secteurs public et privé afin de tenir compte des réalités de l'économie numérique actuelle.
En adoptant des lois modernes et prévisibles qui sont fondées sur des normes communes à celles de pays qui partagent les mêmes principes, nous pouvons créer un environnement réglementaire qui permettra aux organisations de mieux se positionner et de réussir dans un contexte de mondialisation.
Dans mon allocution d'aujourd'hui, je parlerai du travail accompli par le Commissariat pour protéger et promouvoir la vie privée à l'heure où se succèdent rapidement les changements technologiques, de nos efforts pour défendre la vie privée des enfants, ainsi que de l'importance de la collaboration et de notre rôle croissant sur la scène internationale.
Je vais également aborder quelques initiatives qui pourraient être d'un intérêt particulier pour vous, notamment nos récentes conclusions dans l'affaire TikTok et le cas de déréférencement par Google, notre travail dans le cadre du Forum canadien des organismes de réglementation numérique et les façons dont la récente transformation du fonctionnement du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada nous permet d'obtenir des résultats pour la population canadienne de manière plus rapide et plus efficace.
L'une de mes priorités stratégiques consiste à protéger et à promouvoir la vie privée à l'heure où se succèdent rapidement les changements technologiques.
Les nouvelles technologies comme l'IA sont alimentées par la collecte massive de données, qui comprennent les renseignements personnels des Canadiennes et des Canadiens.
Il est donc essentiel que l'IA et les technologies connexes soient développées et déployées de façon responsable et de manière à protéger la vie privée.
Cela signifie qu'il faut tenir compte des répercussions sur la vie privée dès le début de toute initiative, faire preuve de transparence quant à l'utilisation de l'IA et être tenu responsable de toute décision générée par l'IA à propos d'individus, qu'il s'agisse d'accorder un prêt ou de donner un emploi à quelqu'un.
Je travaille en collaboration avec mes partenaires nationaux et internationaux, ainsi qu'avec d'autres partenaires dans ce domaine de réglementation, afin d'élaborer et de promouvoir des principes de protection de la vie privée qui soutiendront les technologies d'IA et d'autres technologies émergentes pour qu'elles soient conçues et bâties sur des bases solides, qui peuvent être adaptées au fil du temps.
Nos travaux ont fait ressortir que, si l'innovation technologique peut procurer des avantages considérables pour l'économie, la société et l'intérêt public, la valeur procurée par l'innovation peut être compromise en l'absence de confiance.
Il est important pour les développeurs et les fournisseurs de nouvelles technologies d'intégrer la protection de la vie privée dans la conception, l'exploitation et la gestion des nouveaux produits et services. Nous demandons aussi à ceux-ci de tenir compte de l'incidence particulière que ces outils ont sur les enfants ainsi que sur les groupes qui sont depuis longtemps victimes de discrimination ou de préjugés.
Alors que l'IA est au cœur des débats sur l'innovation technologique et la réglementation partout dans le monde depuis le lancement de ChatGPT il y a trois ans, le Commissariat œuvre aussi activement à faire avancer les approches de protection de la vie privée dans d'autres domaines.
Par exemple, en 2023, je me suis joint à d'autres autorités de protection des données du monde entier afin de signer une déclaration commune sur l'extraction des données, qui comprend l'extraction automatisée de données à partir de sites Web. Cette pratique représente un risque important pour la vie privée des Canadiennes et des Canadiens, car les données extraites peuvent être utilisées aux fins suivantes : cyberattaques ciblées, vol d'identité, création de bases de données de reconnaissance faciale, collecte non autorisée de renseignements par la police, marketing direct non sollicité et pourriels.
La déclaration définit nos attentes concernant ce que les organisations qui hébergent des données devraient faire pour assurer la protection des individus contre les risques résultant de l'extraction illégale de données. De plus, elle a donné lieu à des consultations auprès d'entreprises de médias sociaux et d'autres parties prenantes de l'industrie.
Le Commissariat a également fait partie des 26 autorités d'application des lois en matière de protection de la vie privée du Canada et de partout dans le monde qui ont participé au dernier ratissage du Global Privacy Enforcement Network (GPEN) en 2024. Collectivement, nous avons constaté que, sur plus de 1 000 sites Web et applications examinés, 97 % d'entre eux utilisaient au moins une forme de mécanisme de conception trompeuse pour inciter les gens à fournir en ligne plus de renseignements personnels qu'ils ne le souhaitent ou qu'ils ne le devraient.
Après la publication des résultats du ratissage, le Commissariat a écrit à 27 organisations pour les inviter à examiner leurs sites Web et leurs applications afin de repérer les mécanismes de conception trompeuse. Je suis heureux d'annoncer que près des trois quarts de ces organisations se sont engagés à apporter des améliorations afin d'éviter cette pratique.
Défendre le droit à la vie privée des enfants est une autre des priorités stratégiques du Commissariat. Cette priorité tient compte des caractéristiques propres à la vie privée des jeunes et de la nécessité de garantir la protection de leurs droits afin qu'ils puissent profiter de la technologie sans que leur bien-être et leur vie privée soient compromis.
Au cours de la dernière année, nous avons fait de la recherche afin d'approfondir notre compréhension des problèmes de protection de la vie privée qui ont des répercussions sur les jeunes et de tenir compte de la protection de la vie privée des enfants dans le cadre de nos activités d'application de la loi.
Par exemple, le mois dernier, j'ai publié les conclusions d'une enquête conjointe sur TikTok menée avec mes homologues du Québec, de la Colombie-Britannique et de l'Alberta.
L'enquête a révélé que les mesures prises pour empêcher les enfants d'accéder à la plateforme populaire de partage de vidéos et pour prévenir la collecte et l'utilisation de leurs renseignements personnels sensibles aux fins de profilage et de ciblage étaient inadéquates.
Les leçons tirées de cette enquête peuvent s'appliquer à de nombreuses entreprises. Par exemple, nos conclusions font ressortir la nécessité de cerner et de prévenir les risques pour les groupes vulnérables, notamment les enfants. Il est important de réfléchir consciemment à la manière de placer l'intérêt supérieur des enfants au premier plan des services et des activités comme le marketing.
Cette démarche s'aligne avec le Code canadien de déontologie et normes de pratique du marketing, qui prévoit qu'une attention particulière doit être accordée à la question du marketing destiné aux enfants et aux adolescents. Le Code précise que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une préoccupation primordiale lorsqu'il s'agit de ce groupe.
Bien que l'enquête conjointe ait été axée sur les enfants, elle a aussi révélé que TikTok n'a pas bien expliqué ses pratiques en matière de données aux utilisateurs adolescents et adultes. Il en résulte que TikTok n'a pas obtenu de consentement éclairé à la collecte et à l'utilisation d'une importante quantité de données des utilisateurs, y compris les données sensibles de jeunes utilisateurs, comme l'exigent les lois canadiennes en matière de protection des renseignements personnels.
En réponse à nos recommandations, TikTok a apporté ou s'est engagé à apporter un certain nombre d'améliorations à ses pratiques relatives à la protection de la vie privée au cours de l'enquête. Il s'agit notamment de modifications visant à empêcher efficacement les publicitaires de cibler les utilisateurs de moins de 18 ans, sauf sur la base de catégories générales comme la langue et l'emplacement approximatif.
TikTok a également accepté de renforcer ses communications sur la protection de la vie privée afin que les utilisateurs, surtout les plus jeunes, comprennent comment leurs données pourraient être utilisées, notamment à des fins de publicité ciblée et de personnalisation du contenu. En outre, TikTok a également accepté d'améliorer les méthodes de contrôle de l'âge pour empêcher les utilisateurs qui n'ont pas l'âge minimum requis d'accéder à la plateforme et ainsi mieux protéger ces derniers ainsi que leur vie privée.
Cette affaire est porteuse de leçons pour d'autres entreprises : il est en effet essentiel de mettre en place des cadres solides de gestion des données afin de favoriser un environnement dans lequel votre entreprise peut prospérer, innover de manière responsable et gagner la confiance du public.
Innover de manière responsable signifie vous assurer que vous avez obtenu le consentement des clients si vous recueillez leurs renseignements personnels et que vous ne recueillez que ce dont vous avez besoin à des fins commerciales.
Cela signifie que vous devez faire preuve de transparence quant aux renseignements que vous recueillez et quant à l'usage que vous en faites. Cela signifie aussi qu'il faut mettre en place des mesures de protection en vue de protéger les renseignements personnels et atténuer les risques liés à la protection de la vie privée, notamment le risque de recueillir, d'utiliser ou de communiquer plus de renseignements ou des renseignements sensibles qui ne sont pas nécessaires.
La mise en place d'un cadre de gestion des données adéquat vous permettra de continuer à utiliser les données en toute sécurité. Le Commissariat est toujours disposé à discuter des initiatives que vous prévoyez de mettre en œuvre et à vous aider à innover tout en protégeant la vie privée.
En ce qui concerne la question plus vaste du contrôle de l'âge, le Commissariat a organisé l'année dernière une consultation en vue de recueillir des observations sur les circonstances (quand et comment) dans lesquelles des services en ligne devraient confirmer l'âge des utilisateurs afin de restreindre l'accès des jeunes à un certain type de contenu. En nous fondant sur les observations que nous avons reçues, notamment de la part de certaines organisations présentes dans cette salle, nous élaborons actuellement une orientation qui, je l'espère, vous sera utile.
Dans le cadre d'autres travaux liés à cette priorité, le Commissariat élabore actuellement un code sur la protection des renseignements personnels des enfants dans le but de donner des orientations pratiques aux organisations qui traitent les renseignements personnels des enfants. Les codes de pratique établis et les mesures de protection spéciales que l'on retrouve dans les lois sur la protection des renseignements personnels peuvent donner aux enfants des moyens d'exercer leur droit à la vie privée et de se protéger contre les préjudices auxquels ils s'exposent lorsqu'ils naviguent sur Internet.
Pendant un symposium international sur la protection de la vie privée des enfants que j'ai tenu en juin, j'ai aussi annoncé la création d'un conseil consultatif des jeunes afin de permettre aux jeunes de faire connaître leurs points de vue, de raconter leurs expériences et d'échanger des idées sur les questions liées à la protection de la vie privée qui leur tiennent le plus à cœur. Nous pourrons ainsi mieux comprendre les répercussions de ces questions sur leur génération et orienter nos efforts de façon à obtenir des résultats optimaux. Nous en sommes maintenant aux dernières étapes de la mise sur pied de ce conseil.
Comme vous l'avez peut-être constaté à partir des exemples de travaux que j'ai présentés jusqu'à présent, la collaboration est un élément central de mon mandat à titre de Commissaire à la protection de la vie privée du Canada.
La protection de la vie privée est un enjeu mondial qui exige un leadership mondial. Alors que les renseignements personnels circulent au-delà des frontières à des volumes et à une vitesse sans précédent, il n'a jamais été aussi important d'unir nos efforts à ceux de parties prenantes et de partenaires nationaux et internationaux.
En mettant en commun leurs connaissances et leur expertise, en se penchant ensemble sur les nouveaux enjeux et en collaborant pour mettre en place des normes communes, les organisations de juridictions différentes profitent d'une uniformité accrue et peuvent mieux protéger la vie privée des individus en cette période charnière.
J'ai travaillé fort pour accroître encore plus la visibilité internationale et le leadership du Canada dans ce domaine. Je crois que le Canada doit être présent à la table des discussions en vue de protéger la vie privée des Canadiennes et des Canadiens au fur et à mesure que la nouvelle économie numérique se développe.
Le mois dernier, j'ai eu l'honneur d'être élu président de l'Assemblée mondiale pour la protection de la vie privée, le forum international qui regroupe plus de 130 autorités de protection des données et de la vie privée du monde entier.
En tant que président, j'axerai ma vision sur la collaboration autour de trois principaux thèmes, soit :
Alors que la circulation des données personnelles joue un rôle de plus en plus central dans l'économie numérique moderne d'aujourd'hui, le fait que le Commissaire à la protection de la vie privée du Canada occupe ce rôle de leadership mondial représente une occasion importante de contribuer à façonner l'avenir de la protection des données sur la scène internationale.
Un exemple de collaboration visant à optimiser les résultats est l'enquête que j'ai menée conjointement avec le commissariat à l'information du Royaume-Uni sur une atteinte survenue chez 23andMe. Notre enquête a révélé que l'entreprise qui vend des services de dépistage génétique directement aux consommateurs de partout dans le monde n'avait pas mis en place des mesures de sécurité adéquates pour protéger les renseignements personnels de 7 millions de clients, dont près de 320 000 Canadiennes et Canadiens. Les conclusions de l'enquête servent de mise en garde pour toutes les organisations quant à l'importance de la protection des données à une époque où les cybermenaces sont de plus en plus nombreuses.
Des enquêtes conjointes comme celle-ci démontrent que la collaboration réglementaire peut permettre de traiter plus efficacement des questions d'importance mondiale. En mettant en commun leurs pouvoirs, leurs ressources et leur expertise, nos commissariats ont été en mesure de protéger et de promouvoir plus efficacement le droit fondamental à la vie privée des individus partout dans le monde.
Je collabore aussi régulièrement avec mes homologues des provinces et des territoires. Au début du mois, nous nous sommes réunis pour discuter de priorités clés comme la protection de la vie privée des enfants, l'IA, la cybersécurité et la protection des données en ligne.
Pendant la rencontre, j'ai accepté d'assumer les fonctions de coprésident du groupe pour la prochaine année, aux côtés de Caroline Maynard, la Commissaire à l'information du Canada.
En plus de consulter d'autres autorités de protection de la vie privée, je consulte fréquemment le secteur de l'industrie, le milieu universitaire et la société civile. J'estime qu'il est important, lorsque nous rédigeons des orientations à l'intention des organisations, des institutions et des individus, de prendre des mesures pour nous assurer que celles-ci sont aussi claires et utiles que possible.
D'ailleurs, j'aimerais obtenir vos points de vue sur des options pour rendre notre processus de consultation plus efficace. À cette fin, mon équipe lancera une initiative au cours des prochains mois en vue de recueillir les commentaires des parties prenantes au sujet de notre processus de consultation et je vous invite tous et toutes à donner votre avis.
Il est devenu évident que la collaboration entre les organismes de réglementation est essentielle si nous voulons mieux protéger les droits et les intérêts des Canadiennes et des Canadiens dans l'espace numérique.
Ce constat a conduit à la création du Forum canadien des organismes de réglementation numérique en 2023. Le Forum, composé du Bureau de la concurrence Canada, du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, de la Commission du droit d'auteur du Canada et de mon Commissariat, a pour objectif de renforcer l'échange de renseignements et la collaboration sur des sujets d'intérêt commun pour mieux faire face à l'ampleur et au caractère mondial des marchés numériques et à la vitesse à laquelle ils innovent.
Récemment, le Forum a publié un document qui porte sur les répercussions que les médias synthétiques - soit des images, des vidéos, du texte et des enregistrements audio générés artificiellement, y compris l'hypertrucage - ont sur les Canadiennes et les Canadiens ainsi que sur les organisations canadiennes.
Le document tombe à point nommé étant donné l'utilisation répandue des médias synthétiques et le caractère de plus en plus réaliste de ces technologies. Par exemple, des hypertrucages sur vidéo montrant le premier ministre du Canada ou des journalistes connus en train de promouvoir des arnaques financières ont été utilisés pour escroquer la population canadienne. Les fraudeurs ont également utilisé les médias synthétiques pour se faire passer pour des banques et des organismes gouvernementaux en vue de tromper les individus.
J'ai parlé plus tôt des enquêtes conjointes que le Commissariat a menées sur 23andMe et TikTok. Un autre dossier qui pourrait intéresser les entreprises de médias numériques est l'enquête que nous avons conclue récemment sur une plainte contre Google.
L'affaire concernait un individu qui avait fait l'objet d'une accusation criminelle, qui fut abandonnée peu après avoir été déposée. Plusieurs années plus tard, des articles médiatiques au sujet des accusations continuent d'être accessibles en ligne lorsqu'on cherche le nom de l'individu. Ces articles révélaient des renseignements personnels très sensibles qui, selon cet individu, lui ont causé des préjudices directs, comme des agressions physiques, la perte de possibilités d'emploi et une grave réprobation sociale.
Dans le rapport de conclusions d'enquête que nous avons publié en août, nous avons conclu que les individus ont le droit dans des circonstances limitées de faire déréférencer certains renseignements les concernant, de sorte qu'ils ne s'affichent pas dans les résultats d'un moteur de recherche lorsqu'une recherche en ligne est effectuée au moyen de leur nom.
L'enquête a permis de conclure que Google avait contrevenu à la loi fédérale sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé au Canada. Pour se conformer à la loi, Google doit déréférencer les articles en question, afin qu'ils n'apparaissent plus quand le nom de l'individu fait l'objet d'une recherche. Bien que les articles puissent continuer d'exister en ligne et d'être trouvés sur les sites Web où ils ont initialement été publiés, ils ne pourraient être trouvés que par la recherche de termes autres que le nom de l'individu dans le moteur de recherche de Google.
Google a refusé de déréférencer les articles et le Commissariat examine toutes les options possibles pour assurer le respect de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques par l'entreprise.
L'affaire fait ressortir le besoin de moderniser les lois canadiennes sur la protection des renseignements personnels. J'ai recommandé que soit édicté un droit clair et explicite au déréférencement et à la suppression de renseignements personnels des résultats de recherche affichés par un moteur de recherche et d'autres sources en ligne. J'ai bon espoir que ce droit sera intégré dans la prochaine version modernisée de la loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.
Même si je préconise une réforme législative, je veux également m'assurer que nous faisons tout notre possible au sein même du Commissariat pour nous adapter à la complexité croissante de notre environnement et rendre les services que nous offrons à la population canadienne aussi efficaces que possible.
C'est pourquoi, au début de l'année, j'ai mis en place un plan de restructuration et de transformation qui marque le début d'un parcours de changement visant à moderniser le Commissariat pour qu'il exécute son mandat et réalise ses priorités stratégiques de la manière la plus efficace et la plus percutante possible.
Ce plan permettra au Commissariat de réagir plus rapidement et efficacement aux nouveaux enjeux. On y recadre notamment la fonction de conformité comme un continuum, nous permettant ainsi de mettre davantage l'accent sur la mobilisation des organisations, de façon proactive et réactive, afin de favoriser la conformité.
Ce changement vise à reconnaître que ce ne sont pas tous les dossiers qui requièrent la tenue d'une enquête complète qui exige beaucoup de ressources. Parfois, il existe d'autres moyens plus efficaces d'obtenir les résultats escomptés. Dorénavant, notre objectif sera de résoudre le plus grand nombre de cas possible au moyen de la mobilisation proactive et du processus de règlement rapide ainsi que de concentrer nos enquêtes approfondies sur des enjeux ou des incidents prioritaires.
La manière dont nous avons réagi à l'atteinte chez PowerSchool constitue un bon exemple de cette approche. Le Commissariat a engagé des discussions avec l'entreprise afin de parvenir à un règlement rapide, en se penchant sur la façon de réagir à l'incident et la prise de mesures permettant de mieux protéger les renseignements personnels des élèves, des parents et des éducateurs de partout au Canada. Le Commissariat continuera de surveiller la situation pour s'assurer que les engagements pris par PowerSchool sont pleinement respectés.
Avant de terminer, permettez-moi de vous faire part de mes dernières réflexions. La protection de la vie privée est un droit fondamental qui renforce les libertés et la confiance sur lesquelles repose notre démocratie et qui nous unit en tant que Canadiennes et Canadiens.
Ce droit est particulièrement pertinent à une époque où de plus en plus de renseignements personnels sont recueillis, utilisés et communiqués de manières nouvelles et inattendues.
Toutes les personnes ici présentes sont bien placées pour défendre et orienter d'importants travaux au sein de vos propres organisations et institutions, qui sont à la hauteur de la tâche à accomplir.
Les organisations qui tiennent compte des attentes raisonnables des consommateurs en matière de respect de la vie privée, qui investissent dans des mesures de protection rigoureuses pour assurer la sécurité des données qui leur sont confiées et qui réagissent aux atteintes à la protection des données pourront tirer avantage du marché numérique actuel. Lorsque les individus peuvent constater que la protection de leur vie privée est une priorité, ils sont plus enclins à faire confiance à une nouvelle technologie ou à un nouveau service que vous pourriez offrir. Il s'agit là d'un facteur important à prendre en compte, surtout dans un contexte difficile sur le plan économique.
Mettre la protection de la vie privée au cœur des priorités, c'est bâtir une économie canadienne résiliente et une société numérique plus sécuritaire et plus enrichissante. Lorsque les Canadiennes et les Canadiens ont la certitude que leurs données sont protégées et utilisées de manière responsable, cela favorise leur bien-être aujourd'hui et pour les générations futures. Cela favorise aussi un environnement dans lequel les entreprises peuvent prospérer, innover de manière responsable et gagner la confiance du public.
Je vous remercie encore une fois de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui.