10/27/2025 | Press release | Distributed by Public on 10/27/2025 09:23
La condamnation et la peine de deux ans de prison dont un an ferme et à une amende de 500 000 francs CFA (762 euros) dont 1 franc symbolique à l'État malien, infligées à l'ancien premier ministre malien Moussa Mara pour des accusations entre autres d'atteinte au crédit de l'État constituent une parodie de justice, a déclaré Amnesty International, appelant les autorités à le libérer immédiatement, ainsi que les autres personnes détenues uniquement en raison de leurs opinions politiques.
« La condamnation et la peine prononcées à l'encontre de Moussa Mara illustrent le mépris persistant des autorités pour les obligations du Mali en matière de droits humains en vertu de la Constitution du pays, de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auxquels le Mali est partie », a déclaré Marceau Sivieude, directeur régional d'Amnesty International pour l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique centrale.
« Au lieu de museler les voix critiques, les autorités doivent mettre fin à la répression croissante de l'opposition pacifique et aux pratiques autoritaires, et libérer immédiatement les personnes actuellement détenues pour le simple fait d'avoir exprimé leur opinion. Les autorités doivent respecter et garantir les droits humains de tous dans le pays, y compris la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique. »
Moussa Mara, premier ministre d'avril 2014 à janvier 2015 et président du parti d'opposition Yéléma, a été arrêté le 1er août et accusé d'« atteinte au crédit de l'État », d' « incitation au trouble à l'ordre public ». et d'« opposition à l'autorité légitime ».
Son arrestation est survenue après qu'il a publié, le 4 juillet, un tweet exprimant sa solidarité avec plusieurs activistes et politiciens détenus. Dans son tweet, évoquant la « nuit », il s'engageait à se battre « par tous les moyens pour que [le soleil apparaisse] ».
Les autorités doivent cesser de recourir aux détentions arbitraires, aux disparitions forcées et à l'utilisation abusive du système pénal pour réduire au silence les opposant·e·s pacifiques au Mali.
Marceau Sivieude, directeur régional d'Amnesty International pour l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique centraleDe récents cas d'arrestations arbitraires et de disparitions forcées
De nombreux journalistes et activistes ont été pris pour cibles dans le cadre de la répression menée contre les voix jugées critiques au Mali.
Le 8 mai 2025, El Béchir Thiam, journaliste et membre du parti Yéléma de Moussa Mara, a été enlevé par des hommes cagoulés se présentant comme des agents des services de renseignement. Cet enlèvement est survenu au lendemain de sa prise de parole publique critiquant la décision du parlement de transition d'accorder au gouvernement militaire un nouveau mandat de cinq ans. Le sort et le lieu de détention de Thiam étaient alors inconnus, les autorités n'ayant pas reconnu sa détention ni divulgué d'informations à ce sujet. Le 17 juillet, son épouse a porté plainte pour enlèvement. Le 26 septembre, il a été libéré et autorisé à rentrer chez lui.
Clément Dembélé, activiste anti-corruption, a été arrêté en novembre 2023 alors que lui et son organisation, la Plateforme contre la corruption et le chômage, s'apprêtaient à tenir une conférence de presse pour dénoncer les coupures d'électricité récurrentes. Dembélé a été accusé d'avoir proféré des menaces de mort à l'encontre du chef de l'État Assimi Goïta et de sa famille. En avril 2025, un juge d'instruction a rejeté les accusations portées contre Dembélé et a demandé sa libération. Malgré cette décision, il reste détenu arbitrairement.
En août et septembre 2025, l'expert indépendant des Nations unies sur le Mali avait dénoncé la disparition forcée d'El Béchir Thiam et l'arrestation arbitraire de Clément Dembélé, et appelé à leur libération.
« Les autorités doivent cesser de recourir aux détentions arbitraires, aux disparitions forcées et à l'utilisation abusive du système pénal pour réduire au silence les opposant·e·s pacifiques au Mali. Elles doivent garantir le respect du droit à un procès équitable et faire respecter l'état de droit », a déclaré Marceau Sivieude.
D'autres voix critiques réduites au silence depuis 2023
Rokiatou Doumbia, également connue sous le nom de « Rose Vie Chère » ou « Tantie Rose », a été arrêtée en mars 2023 pour avoir dénoncé la détérioration de la situation sécuritaire et le coût de la vie depuis la prise de pouvoir par les militaires. Elle a été accusée d'« incitation à la révolte », d'« atteinte au crédit de l'État » et d'« association de malfaiteurs », et condamnée à un an de prison en août 2023. Bien qu'elle ait purgé sa peine initiale, elle est toujours détenue arbitrairement.
En mars 2023, l'animateur radio et activiste Mohamed Youssouf Bathily, connu sous le nom de « Ras Bath », a été arrêté après avoir qualifié d' « assassinat » la mort en détention de l'ancien premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga. Il a été condamné en appel en août 2023 à 18 mois de prison pour « simulation d'infraction », c'est-à-dire pour avoir accusé l'État d'avoir commis une infraction. Bien qu'il ait purgé sa peine, Ras Bath a de nouveau été inculpé d' « association de malfaiteurs », d' « atteinte au crédit de l'État » et de « crimes à caractère régionaliste, raciste et religieux » pour les mêmes faits, et reste en détention provisoire.
En septembre 2023, l'activiste et membre du Conseil national de transition Adama Diarra, connu sous le nom de « Ben le Cerveau », a été arrêté après avoir appelé au retour à un régime constitutionnel civil. Il a été accusé d' « atteinte au crédit de l'État » et condamné à deux ans de prison. En février 2025, une demande de libération provisoire déposée par ses avocats a été rejetée, et Diarra reste en détention arbitraire.
Issa Kaou N'Djim, un autre ancien membre du Conseil national de transition, a été condamné à deux ans de prison après avoir mis en doute, en novembre 2024, la véracité d'une déclaration des autorités burkinabè au sujet d'une tentative de coup d'État. N'Djim a été arrêté à la suite d'une plainte déposée par les autorités burkinabè et accusé d' « offense commise publiquement envers un chef d'État étranger ».
Contexte
Le Mali est gouverné par des autorités militaires depuis le coup d'État contre le président Ibrahim Boubacar Keïta en 2020. La transition, qui devait durer 18 mois, a été prolongée à trois reprises au-delà de son terme. En avril 2025, le gouvernement a annoncé la dissolution de tous les partis politiques et la prolongation de la transition pour une nouvelle période de cinq ans.
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