11/10/2025 | Press release | Distributed by Public on 11/10/2025 08:54
Quatre mois après l'enlèvement du journaliste et fondateur du média Olofofo, Hugues Comlan Sossoukpè, Reporters sans frontières (RSF) révèle que son confrère Ali Moumouni a lui aussi été arrêté et est enfermé depuis le 16 juillet. Selon les informations de l'organisation, il a été interrogé sur sa collaboration avec ce média d'investigation. RSF s'alarme de ces détentions manifestement arbitraires de journalistes.
Au Bénin, une chasse aux journalistes ayant collaboré avec Olofofoest-elle lancée ? Après avoir dévoilé l'enlèvement, le 10 juillet en Côte d'Ivoire, du directeur de ce média béninois d'investigation, Hugues Comlan Sossoukpè, RSF révèle que l'arrestation, le 16 juillet, de son confrère Ali Moumouni est intrinsèquement liée à cette affaire. D'après les informations recueillies par l'organisation, les autorités reprochent à Ali Moumouni sa collaboration depuis septembre 2024 avec Olofofo- média critique dirigé et fondé par Hugues Comlan Sossoukpè, et interdit de diffusion depuis mars 2025.
Ali Moumouni a été interpellé six jours après Hugues Comlan Sossoukpè sans motif officiel ni mandat d'arrêt, selon les informations de RSF. Son domicile a été perquisitionné et son matériel a été confisqué, sans mandat également. Il est placé sous mandat de dépôt le 21 juillet à la prison centrale de Cotonou et est visé par cinq chefs d'accusation, dont "incitation à la violence et à la rebellion", "harcèlement par le biais de communications électroniques" et "apologie du terrorisme".
Près d'un mois après la reprise des activités judiciaires - interrompues entre le 5 août et le 8 octobre -, Ali Moumouni n'a ni comparu, ni même été entendu par quelque autorité judiciaire que ce soit. Il reste maintenu en détention provisoire, sur la base du mandat de dépôt émis le 21 juillet. Contacté par RSF, le procureur spécial de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET), n'a pas répondu à ses questions.
"La détention provisoire d'Ali Moumouni s'éternise. Passée sous le radar médiatique et politique, elle est l'une des nombreuses ramifications de la grotesque affaire montée contre Hugues Comlan Sossoukpè. Une affaire inique basée sur des motivations politiques. Dans leur chasse à l'homme, les autorités béninoises oublient qu'une simple collaboration professionnelle ne peut justifier la détention d'un journaliste. RSF dénonce les détentions arbitraires d'Ali Moumouni et d'Hugues Comlan Sossoukpè et demandent leur libération immédiate."
Le 16 juillet dernier, Ali Moumouni, ancien journaliste de Canal 3 du groupe de presse Fraternitécommence à peine sa troisième journée de formation en journalisme des élèves du collège Sainte Rita, à Cotonou, lorsque deux individus habillés en civil, selon les informations de RSF, lui font signe de sortir de la salle vers 8 h 45. Après dix minutes de conversation, les individus l'auraient sommé de les suivre, sans transmettre de motif officiel ni de mandat d'arrêt. S'ensuit une perquisition à son domicile, là encore sans notification ni document officiel pour saisir ses appareils électroniques, selon les informations recueillies par RSF. Le journaliste est conduit au Centre national d'investigations numériques, anciennement appelé Office central de répression de la cybercriminalité (OCRC). Il y passe la journée, avant d'être interrogé et transféré dans la foulée au commissariat du port de Cotonou. Cinq jours plus tard, le 21 juillet, Ali Moumouni est finalement placé sous mandat de dépôt par la chambre des libertés et de la détention de la CRIET. Il est depuis détenu provisoirement à la prison civile de Cotonou.
Un média dans le viseur des autorités depuis 2019
Enlevéle 10 juillet à Abidjan, alors qu'il était invité par les autorités ivoiriennes pour une mission professionnelle, Hugues Comlan Sossoukpè est détenu à la prison civile de Ouidah, au sud du Bénin. Ces derniers mois, il avait fait part à RSF de menaces répétées, y compris au Togo, où il avait obtenu l'asile en 2021, deux ans après avoir dû fuir son pays parce qu'il avait contribué à documenter et critiqué les élections législatives de 2019 qui s'étaient déroulées sans l'opposition.