UNOG - United Nations Office at Geneva

11/11/2025 | News release | Distributed by Public on 11/11/2025 23:27

À la COP30, l’IA et le refroidissement durable au cœur des débats

Alors que la planète se réchauffe, la course aux technologies capables d'en atténuer les effets s'intensifie. À la COP30, qui se tient à Belém du 10 au 21 novembre, les délégués s'interrogent sur un paradoxe central : comment exploiter la puissance de l'intelligence artificielle (IA) et des systèmes de refroidissement modernes sans aggraver la crise qu'ils entendent combattre.

L'IA aide déjà les agriculteurs à anticiper les sécheresses et à gérer plus efficacement leurs cultures, mais le coût environnemental de l'entraînement des grands modèles et de l'exploitation des immenses centres de données alarme de plus en plus. Parallèlement, le refroidissement - autrefois perçu comme un luxe et désormais vital dans nombre de régions - est devenu l'un des secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre.

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Des solutions émergent : architecture bioclimatique, réfrigération solaire, conception passive… mais leur déploiement à grande échelle reste difficile. Au cœur des négociations de la conférence de l'ONU sur le climat, figure le programme de mise en œuvre technologique, censé accélérer la diffusion d'innovations vitales vers les pays qui en ont le plus besoin. Or les progrès sont lents : droits de propriété intellectuelle, contraintes commerciales et obstacles financiers continuent d'entraver l'accès des pays en développement.

Refroidir une planète en surchauffe

La directrice exécutive de la COP30, Ana Toni, a indiqué lundi, à l'issue de la séance d'ouverture du sommet, qu'elle participait à des discussions sur des innovations susceptibles d'accélérer les solutions climatiques - systèmes d'alerte contre les inondations, satellites de détection du méthane, gains d'efficacité énergétique.

Mardi, la présidence brésilienne de la COP, le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) et leurs partenaires de la Cool Coalition ont lancé l'initiative « Beat the Heat Implementation Drive », destinée à rendre le refroidissement plus accessible - et moins polluant - dans un monde où les vagues de chaleur extrême deviennent la norme.

Selon les projections, la demande mondiale de refroidissement pourrait tripler d'ici 2050, sous l'effet combiné du réchauffement, de la croissance démographique et de l'usage d'appareils inefficaces. Sans intervention, les émissions du secteur pourraient presque doubler, saturant les réseaux électriques et éloignant encore les objectifs climatiques.

Le nouveau rapport du PNUE, « Global Cooling Watch 2025 », alerte : à trajectoire inchangée, le refroidissement générerait 7,2 milliards de tonnes d'émissions équivalent CO₂ d'ici le milieu du siècle.

L'initiative Beat the Heat promeut une feuille de route pour un refroidissement durable, combinant conception passive, solutions fondées sur la nature et technologies propres. Selon le PNUE, ces approches peuvent réduire les émissions jusqu'à 97 %, si elles s'accompagnent d'une décarbonation rapide. Près des deux tiers des gains potentiels viendraient de solutions passives et sobres en énergie - souvent abordables et faciles à déployer.

« Le refroidissement doit être considéré comme une infrastructure essentielle, au même titre que l'eau et l'énergie », a souligné Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE. « Mais nous ne pourrons pas nous climatiser pour sortir de la crise thermique ».

Plus de 185 villes, de Rio à Nairobi, ont rejoint Beat the Heat, aux côtés de 72 pays soutenant le Global Cooling Pledge. L'initiative entend combler les écarts de financement et de mise en œuvre, notamment dans les communautés les plus exposées au réchauffement.

L'IA, nouvel acteur du climat

Si l'intelligence artificielle ne figure pas parmi les négociations officielles de la COP30, elle occupe une place croissante dans l'Action Agenda, qui fédère les engagements volontaires de la société civile, des entreprises et des collectivités. Ces acteurs ne signent pas de traités, mais ils sont indispensables à la mise en œuvre concrète des promesses climatiques.

Le gouvernement brésilien a recensé plusieurs projets illustrant le potentiel de l'IA au service de la résilience climatique. L'un des plus remarquables vient du Laos, où la chercheuse Alisa Luangrath a développé dans la province de Savannakhet un système d'irrigation intelligent fondé sur l'intelligence artificielle, dans une région durement touchée par la pénurie d'eau.

Lauréate 2025 du prix « AI for Climate Action » de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, Mme Luangrath a conçu un outil combinant capteurs d'humidité des sols, surveillance des nappes phréatiques et données météorologiques, analysés par algorithmes. Les agriculteurs reçoivent des prévisions et des conseils en temps réel via une application mobile, optimisant ainsi leurs cycles de plantation et d'irrigation.

Elle a confié à ONU Info espérer que sa présence à Belém favorisera de nouveaux partenariats pour diffuser cette innovation dans d'autres pays vulnérables. Tous les modèles d'IA et outils de données qu'elle a mis au point seront accessibles en licence libre, garantissant leur réutilisation ouverte et gratuite.

© FAO/Luis Tato
Grâce à l'IA, le technicien de terrain comprend la vision de l'agriculteur, apprend quelles données doivent être collectées et les saisit dans le logiciel, qui donne vie à des business plans clairs et visuellement efficaces.

L'empreinte écologique du numérique

Mais cette révolution numérique soulève une autre inquiétude : le coût environnemental de la donnée.

Luã Cruz, coordinateur pour les télécommunications et les droits numériques à l'Institut brésilien de défense du consommateur (Idec), rappelle que même les usages les plus banals - téléphonie mobile, navigation en ligne - reposent sur d'immenses centres de données.

« Ces installations consomment d'énormes quantités d'énergie et d'eau pour leur refroidissement, occupent de vastes superficies et nécessitent une extraction minière importante pour leurs composants électroniques », souligne-t-il.

Selon lui, nombre de ces centres « ignorent les limites planétaires », recherchant des territoires à faible régulation environnementale et bénéficiant d'avantages fiscaux.

L'eau, nouvelle ligne de tension

Comme plusieurs pays, le Brésil tente d'attirer ces infrastructures numériques. Une stratégie risquée, selon M. Cruz, qui redoute une aggravation de la pression sur les ressources hydriques. Il cite le moratoire néerlandais sur les nouveaux centres de données, ainsi que la fermeture d'installations au Chili et en Uruguay, jugées responsables d'avoir accentué les sécheresses locales.

L'Idec a engagé deux actions en justice au Brésil : l'une contre un centre de données TikTok projeté à Caucaia (Ceará), à proximité d'un territoire autochtone ; l'autre visant un projet à Eldorado do Sul (Rio Grande do Sul) - une ville submergée à plus de 80 % lors des inondations dévastatrices de 2024.

Entre l'IA et le refroidissement durable, la COP30 met en lumière une tension majeure : les technologies censées aider la planète risquent, si elles sont mal encadrées, d'aggraver la crise climatique. L'enjeu, désormais, n'est plus d'innover à tout prix, mais d'innover autrement - dans les limites écologiques d'une planète finie.

UNOG - United Nations Office at Geneva published this content on November 11, 2025, and is solely responsible for the information contained herein. Distributed via Public Technologies (PUBT), unedited and unaltered, on November 12, 2025 at 05:27 UTC. If you believe the information included in the content is inaccurate or outdated and requires editing or removal, please contact us at [email protected]