09/15/2025 | Press release | Distributed by Public on 09/15/2025 07:29
Le journaliste indépendant Sherwan Sherwani devait retrouver la liberté mais une troisième peine de prison prononcée le 20 août 2025 le maintiendra quatre ans et cinq mois supplémentaires derrière les barreaux dans la ville d'Erbil, au Kurdistan irakien. Reporters sans frontières (RSF) dénonce des condamnations et une détention iniques du journaliste et demande sa libération immédiate.
L'histoire se répète pour le journaliste indépendant Sherwan Sherwani, qui aurait dû être libre le 9 septembre. Arrêté en 2020, il a été condamné en 2021 à six ans de prison pour "espionnage", alors qu'il enquêtait sur la corruption présumée des dirigeants du Kurdistan irakien. Sa peine a finalement été réduite à trois ans par un décret présidentiel, mais en juillet 2023, deux mois avant la date de sa libération, il a été de nouveau condamné pour quatre ans supplémentaires, sous l'accusation fallacieuse d'avoir falsifié un document à destination de l'administration pénitentiaire. Cette peine ayant été réduite à deux ans, il a fait une demande de libération anticipée qui lui a été refuséele 9 mars 2025.
Le journaliste attendait donc avec impatience de retrouver la liberté le 9 septembre. Mais quelques semaines auparavant, le 19 août, il est condamné une troisième fois, cette fois-ci pour quatre ans et cinq mois supplémentaires. L'accusation ? Il aurait "menacé un gardien"pendant son incarcération en 2022, selon la cour d'appel d'Erbil. Ce que nie le journaliste.
"RSF dénonçait déjà la peine de Sherwan Sherwani comme étant injuste, cruelle et vindicative. Sa troisième condamnation consécutive confirme un acharnement judiciaire contre le journaliste. Maintenir Sherwan Sherwani derrière les barreaux pendant quatre années supplémentaires, alors qu'il n'aurait jamais dû passer un seul jour en prison, est une mesure répressive digne des États les plus autoritaires. Le public et les journalistes du Kurdistan irakien méritent mieux. Nous appelons les autorités kurdes, qui affirment depuis longtemps leur attachement aux principes démocratiques, à libérer immédiatement le journaliste. Son maintien en détention constitue une menace pour tous les autres journalistes de la région autonome."
Cette troisième condamnation repose sur une plainte déposée en 2022. Selon le verdict consulté par RSF, le tribunal a reconnu Sherwan Sherwani coupable d'avoir proféré des "menaces de mort" contre un des gardiens de la prison d'Erbil, la capitale du Kurdistan irakien. Le tribunal a invoqué l'article 229 du Code pénal irakien, qui traite des menaces ou des agressions contre des fonctionnaires, et s'est appuyé sur les témoignages de l'officier et de deux gardiens. Le journaliste nie avoir proféré des menaces : il aurait seulement exprimé "son refus d'être transféré d'une cellule à une autre au sein de la prison et souhaité en connaître la raison".Contacté par RSF, l'avocat du journaliste, Muhammed Abdallah, dénonce quant à lui des "motivations politiques". "Ce procès a duré deux ans. Il était motivé par des raisons politiques et n'avait aucun fondement juridique," dit-il à RSF. "Son seul objectif était de maintenir Sherwan Sherwani en prison. En tant qu'avocat, j'ai été systématiquement empêché par les juges et la police d'accéder au dossier." L'avocat a également exprimé ses inquiétudes quant au bien-être de Sherwan Sherwani en prison.
Journaliste d'investigation et reporter kurde renommé, Sherwan Sherwani avait déjà été soumis à des pressions en lien avec ses enquêtes sur des affaires de corruption et sur les cas de journalistes et écrivains kurdes assassinés au Kurdistan depuis 1991. Il a été arrêté une première fois en 2012 et détenu pendant six jours à la suite de la publication en 2011 d'un article dans le mensuel Bashur Magazinerévélant une affaire de corruption impliquant un officiel de la municipalité de Duhok, dans l'extrémité nord de la région. Quelques mois plus tard, il était poursuivi pour diffamation par un proche du clan Barzani, une puissante famille qui domine la région autonome.