04/24/2025 | Press release | Distributed by Public on 04/24/2025 12:08
Plusieurs mois après la prise de Goma et d'autres localités du Nord-Kivu et du Sud-Kivu en République démocratique du Congo (RDC), le groupe rebelle M23 continue d'accroître sa mainmise sur l'information dans les territoires occupés. Reporters sans frontières (RSF) dénonce cette stratégie de contrôle qui cible les médias locaux et s'inquiète des pressions ciblant les journalistes.
Depuis la prise de territoires importants dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, le groupe rebelle M23 s'attelle à "gagner" les esprits, comme l'illustre la mise en place d'une "formation à l'idéologie du M23"pour des personnalités de différentes professions en mars dans le Nord-Kivu.
Pour les journalistes spécifiquement, les membres de la cellule de communication du M23 ont organisé une réunion avec une soixantaine de responsables de médias et journalistes de la province, le 23 février dernier, à Bukavu (capitale du Sud-Kivu), afin de leur donner une dizaine de directives. Parmi celles-ci : l'interdiction de diffuser les propos des autorités congolaises et de relayer des informations négatives sur le M23, ou encore le remplacement du verbe "occuper"par "libérer"dans l'ensemble des productions journalistiques à propos de la prise de contrôle des territoires. Contacté à plusieurs reprises, le porte-parole du M23, Lawrence Kanyuka, n'a pas répondu aux sollicitations de RSF.
"De nombreux reporters fuient les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, où de nombreuses villes sont sous le contrôle du M23, parce qu'ils craignent pour leur sécurité. Ils sont souvent victimes de menaces et de mises en garde, voire enlevés et retenus pendant plusieurs jours. Les dernières mesures prises par le groupe rebelle sont inquiétantes et entravent la liberté d'informer des journalistes, qui s'efforcent d'exercer leur travail dans ce contexte particulièrement difficile. RSF dénonce ce contrôle croissant de l'information, qui s'apparente à de la propagande, et demande au M23 de respecter le droit à l'information.
Depuis la prise des villes de Goma et de Bukavu, plusieurs journalistes ayant dénoncé les exactions commises par le groupe rebelle se sentent en danger. En février, au moins deux responsables de médias au Nord-Kivu, qui souhaitent garder l'anonymat, ont été enlevés et enferméspar le groupe rebelle pendant au moins une dizaine de jours et nombre d'entre eux font l'objet de menaces ou d'intimidations. Un reporter a témoigné à RSF être ainsi visé par des messages anonymes sarcastiques le questionnant sur l'arrêt de ses publications depuis la prise de sa localité par le groupe armé. Un autre subit des pressions de la part de membres haut placés du M23 pour rejoindre leurs rangs.
Entre les pressions et les agressions, les conditions d'exercice des journalistes se sont considérablement dégradées depuis le début de l'année 2024. RSF a recenséau moins 26 radios pillées ou fermées dans la province du Nord-Kivu entre janvier 2024 et janvier 2025.